L'hiver n'est pas fini Page 240 et 241 du Visage Lisse

-Le printemps avait fini par gagner ses

lettres de noblesse, l’hiver avait abandonné lâchement

la lutte et s’octroyait une pause. Il aurait suffi de pas

grand-chose pour que son armée fortifiée par les gelées

nocturnes fasse subir quelques assauts cruels à l’enfant

Printemps, encore frêle mais déjà acnéique, dont les

boutons explosaient partout dans les plis et replis de

chaque parcelle brune du jardin. Ce prince juvénile et

bigarré était arrivé, accompagné de sa cohorte de

sous fifres obéissants, forsythias, violettes, jonquilles, fleurs

d’amandiers et autres artifices. Il n’avait pas respecté

cette logique connue de tous : le printemps est annoncé

pour le 21 mars. C’était une injonction vaine, venue de

très loin, du fin fond des âges, de la date approximative

de l’équinoxe. L’hiver, chacun le savait, avait droit de

cité, voire de vie et de mort jusqu’au 20 mars minuit-.